Le remplacement de la hanche par une prothèse est une intervention fiable apportant au patient un soulagement de la douleur et une bonne récupération de la fonction articulaire. La durée de vie des implants est maintenant très bonne avoisinant les 95% à 10 ans. C’est sans doute l’intervention la plus pratiquée dans les pays occidentaux, et sa fréquence va sans doute augmenter de près de 170% d’ici 2030.
Historiquement la demande des patients était principalement l’indolence et le retour à une vie sédentaire agréable. Actuellement, les patients opérés sont de plus en plus jeunes et actifs et donc demandeurs d’une fonction leur permettant une pratique régulière du sport, pour leur bien-être physique et mental.
La reprise du sport après une prothèse de hanche est donc un thème fréquemment abordé en consultation par les malades.
Il n’est pas toujours facile de répondre de façon objective et pragmatique à cette question car l’attente des patients est parfois forte. En face, certains chirurgiens craignent la survenue de complications, alors qu’à l’inverse d’autres peuvent être plus permissifs, satisfaisant la demande de leur patient.
Il est donc important de pouvoir se référer à des données objectives fournies par la littérature.
Comme le montre l’article de Dautry et Leteneur en 2007 la question était déjà d’actualité et prenait en compte le patient, le chirurgien et la revue de littérature. La problématique n’a donc pas changé depuis 10 ans.
Pour y répondre il faut bien comprendre les attentes des patients opérés d’une prothèse de hanche en fonction de sa pratique sportive : le sport pratiqué, le niveau de pratique, son intensité, son caractère traumatisant.
Ensuite, il faut répondre à ces attentes selon les risques inhérents à cette intervention, la technique choisie, et le type d’implant utilisé.
Afin de pouvoir répondre objectivement aux patients il faut avant tout leur exposer clairement les risques auxquels ils s’exposent en pratiquant un sport avec une prothèse de hanche.
Ces risques comprennent la luxation de la prothèse, la fracture des os autours de la prothèse, le descellement précoce des implants, la fracture des implants et des inserts en céramiques, et l’usure prématurée des surfaces articulaires. Ainsi, la pratique d’une activité sportive intense est connue pour être corrélée à un taux de particule élevée et une destruction osseuse. Le taux de reprise à 10 ans est aussi plus élevé pour des patients pratiquant des sports à impacts élevé.
A l’inverse, la pratique d’une activité physique et sportive apporte incontestablement une amélioration de la qualité de vie un bien-être physique et psychique qui contribuera à la satisfaction du patient. Une étude comparative entre une série de patients opérés de PTH et non opérés souffrant d’arthrose montre sur deux ans une nette amélioration des fonctions cardiovasculaires confirmant que la reprise d’une activité physique a incontestablement un effet bénéfique.
Les patients sont plus jeunes, pratiquent régulièrement une activité sportive et leur état physique très satisfaisant. Leur attente est donc assez forte sur la poursuite de leur activité sportive.
Il a fallu donc évoluer, car les attentes des patients depuis 10 ans ne sont plus exactement les mêmes aujourd’hui. Ainsi en 2005, dans « annals of rhumatysm deseases », les patients âgés de plus de 60 ans ne pratiquaient une activité sportive que dans 30% des cas au moment de l’intervention, et pour une population atteinte de coxarthrose ayant fait du sport à 97%, seulement 36 % avaient maintenu leur activité sportive au moment de la chirurgie.[i]
Actuellement entre 78% et 90% des patients pratiquent une activité sportive avant la survenue des symptômes et 61 %à 90% poursuivent cette activité entre 1 et 3 ans après la pose d’une prothèse, 55% à 6 ans.
En réalisant des questionnaires, sur l’attente des patients, on se rend compte qu’elle n’est pas si importante. seulement 30 % des patients s’attendent à avoir après l’intervention une récupération des fonctions meilleurs que ce qu’ils ont avant pour des activités quotidiennes standards, mais actuellement ce taux est nettement plus élevé.
Les résultats sont parfois différents entre les Etats Unis et l’Europe. Ainsi en Europe, les demandes sont moindres après 60 ans et chez les hommes, alors que c’est l’inverse aux USA. Par ailleurs, les demandes sont plus importantes quand le niveau d’étude est plus important aussi bien en Europe qu’aux USA.
Figure 1 : attentes des patients en préopératoire
Mais finalement, les patients qui ont le plus d’attentes se disent aussi plus satisfaits que les autres. Sans doute parce que leur niveau de conscience dans l’importance de leur rôle et de leur implication dans la qualité du résultat est plus importante.
Après la mise en place d’une prothèse, 25,4% des patients trouvent que le retour à la pratique d’une activité sportive est en dessous de leurs attentes, mais 55,9% sont satisfaits et 18,7 sont satisfaits au-delà de leurs attentes (soit près de 75% de satisfait). Pour Bonnin et al ce taux est de 92%
Pour autant, la capacité à réaliser certains gestes courants montre aussi parfois les limites de l’intervention. Il intéressant de noter que seulement 61,7% des patients sont satisfaits globalement dans leur capacité à se couper les ongles de pieds. Cela qui peut paraitre paradoxale, mais en réalité ce geste demande plus de souplesse que de nombreuses activités sportives.
La capacité à reprendre le sport pour un patient dépend de facteurs qui sont propres au patient, et propre à sa pratique sportive en intensité, son caractère traumatisant ou sa demande de souplesse.
La reprise du sport est principalement corrélée au sexe, les hommes reprenant plus, et à l’âge, bien sûr. En revanche, le poids ne semble pas être un élément péjoratif.
Plus le patient est jeune, sportif, sans antécédent notamment sans douleurs lombaires et se sentant « bien dans sa tête », plus son niveau de satisfaction est important alors même que ses attentes sont plus importantes. De plus, le niveau de reprise sportive après la pose d’une prothèse est corrélé directement au niveau sportif préopératoire. Le handicap lié à la prothèse étant compensé par le niveau technique dans le sport pratiqué.
On ne demande pas les mêmes capacités pour marcher, jouer au golf, pratiquer du tennis en simple ou faire ski.
Les classifications qui sont communément acceptées prennent en compte le niveau d’impact verticaux sur la prothèse mais aussi de l’amplitude des mouvements nécessaire à la pratique du sport. Cela permet de regrouper les sports en trois catégories : impacts faibles, moyens et élevés.
Tableau 1 : classification des sports selon leur impact
D’autres activités sportives, pourtant physiques et fréquemment pratiquée, ne sont pas répertoriées, comme le jardinage, les travaux lourds de bricolages pratiquer plus par des hommes. Elles peuvent être classées parmi les activités à impact intermédiaire.
De façon assez constante, tous les patients pratiquant un sport à faible impact en préopératoire reprennent leur activité sportive. Le taux de reprise des sports à impact moyen et élevé est cependant plus faible et on note un passage des pratiques à fort impact vers des pratiques à impact plus faible. Le taux de reprise des sports à fort impact est finalement assez faible de l’ordre de 5%. Mais la demande des patients les pratiquant est souvent forte et augmente, les patients atteints de coxarthrose étant jeune et très demandeur. Ainsi Bonnin retrouve près de 20% de patient pratiquant des sports à impact élevé dit violents.
Selon les enquêtes réalisées par les diverses sociétés, le retour à la pratique du sport se fait le plus souvent après entre le troisième et le sixième mois post-opératoire; mais cela correspond le plus souvent aux recommandations établies par les chirurgiens. Une meilleur préparation pré opératoire permet une meilleure récupération de la fonction articulaire et une reprise plus précoce des activités sportives.
La possibilité de pratiquer des sports dit à risque (ou fort impacts) est liée étroitement au niveau de pratique préopératoire. Plus ce niveau est élevé plus il est possible de reprendre le sport avec bien sûr une préparation physique adéquate et spécifique à la pratique de ce sport. La société Américaine de chirurgie de la hanche et du genou et la hip Society ont émis ainsi un guide de recommandation (tableau 2). Dans la pratique, il n’est pas rare de voir des patients pratiquant les sports à risque passant outre les recommandations de leur chirurgien.
On remarque une évolution dans les recommandations puisque le tennis et les arts martiaux qui étaient interdits sont actuellement sans avis. C’est-à-dire fonction du patient (de son niveau de pratique) et de son chirurgien. Dans de Bonnin finalement la pratique de ces sport ne représente que 10% des patients. (Figure 2)
Figure 2 : Taux de participation aux différentes activités sportives (D'après Bonnin et Al. )
Tableau 2 : Guide de recommandation pour la reprise du sport (la Société Américaine de la hanche du genou et la Hip society).
Les forces exercées sur l’articulation de la hanche ont été très bien calculées par des analyse mathématiques bi ou tri dimensionnelles, des simulations informatiques et des études cadavériques.
Ces études ont bien montré que les activités sportives augmentaient de façon importante les forces exercées sur la hanche parfois jusqu’à 870% pour la pratique du jogging ou la marche rapide. Cela a un impact certain sur la durée de vie des implants en augmentant l’usure et le risque de descellement. De plus les micro traumatismes répétés devrait augmenter le risque de fracture surtout pour un couple céramique-céramique.
Le taux d’ostéolyse est plus important chez un sportif pratiquant des sports à fort impact que chez les patients pratiquant des sports à impact faible ou intermédiaire.
Par contre, pour des patients pratiquant des sports à faible impacts ou à impact intermédiaire il n’y pas de différence avec une population témoin non sportive.
Il n’a pas été mis en évidence de façon formelle et certaine une augmentation du risque de fracture des implants céramiques selon la pratique sportive
Les forces exercées sur l’articulation de la hanche ont été très bien calculées par des analyse mathématiques bi ou tri dimensionnelles, des simulations informatiques et des études cadavériques.
Ces études ont bien montré que les activités sportives augmentaient de façon importante les forces exercées sur la hanche parfois jusqu’à 870% pour la pratique du jogging ou la marche rapide. Cela a un impact certain sur la durée de vie des implants en augmentant l’usure et le risque de descellement. De plus les micro traumatismes répétés devrait augmenter le risque de fracture surtout pour un couple céramique-céramique.
Le taux d’ostéolyse est plus important chez un sportif pratiquant des sports à fort impact que chez les patients pratiquant des sports à impact faible ou intermédiaire.
Par contre, pour des patients pratiquant des sports à faible impacts ou à impact intermédiaire il n’y pas de différence avec une population témoin non sportive.
Il n’a pas été mis en évidence de façon formelle et certaine une augmentation du risque de fracture des implants céramiques selon la pratique sportive.
Finalement cette question reste encore débattue et il n’y a pas de réel consensus.
L’étude anglaise montre que les chirurgiens adaptent les implants en fonction des patients et de leur pratique sportive.
Si le patient est jeune et pratique un sport à fort impact, les tiges sont le plus souvent sans ciments, la tête est en céramique.
Par contre il n’y pas de réel consensus pour le cotyle. Certains chirurgiens optent pour un polyéthylène hautement réticulé et d’autre la céramique. La question n’est pas tranchée entre risque d’usure (avec le polyéthylène) et de fracture (avec la céramique) bien que des études ne montre pas une augmentation du risque dans ce cas. Mais la céramique peut aussi être mal tolérée par la sensation de choc à l’impact ou de crissement très sonore lors la mobilisation de la hanche.
Le polyéthylène hautement réticulé évite ces inconvénients, et présente un taux d’usure moindre que le polyéthylène classique.
L’utilisation de couple metal-polyethylene ou metal-metal est par contre très faible (8% pour chacun) et ne semble plus correspondre à ce type d’indication.
Le choix devra donc dépendre de plusieurs facteurs comprenant le patient, son âge, son sexe, son désir de sport et son niveau de pratique, le besoin de mobilité de l’articulation, et le diamètre de cotyle permettant ou non de mettre de tête de gros diamètre (plus stable). Quand au choix du couple de frottement il faudra bien guider le patient sur les bénéfices et risques de chacun selon sa pratique sportive.
La pose d’une prothèse de hanche ne contre indique pas la reprise de sport, bien au contraire.
Il est important de bien informer ces patients sur les risques de telles pratiques sportives avec une Prothèse de hanche.
La pose d’une prothèse de hanche permettra au patient de retrouver un niveau d’activité, satisfaisant pour son bien être physique et mental et améliorera assez rapidement sa fonction cardiovasculaire.
Les patients pratiqueront souvent plus de sport en fréquence, mais des sports moins traumatisants. Les sports à impact faible et intermédiaire doivent être privilégiés.
La pratique des sports à impact élevé est réservée aux patients ayant un bon niveau de pratique initiale et en fonction de leur âge et de leur capacité physique. Une très bonne préparation pré et post opératoire est recommandée. Le patient informé des risques spécifiques surtout de la diminution possible de la survie de l’implant.
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[10] M. Bonnin et al., « Participation sportive après prothèse totale de hanche », in La Prothèse Totale de Hanche dans Tous ses états (Paris: Elsevier Masson, 2017), 333‑42, https://doi.org/10.1016/B978-2-294-75116-5.00035-0.
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[19] Bradley et al., « Return to Sporting Activity After Total Hip Arthroplasty—A Survey of Members of the British Hip Society ».
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Docteur Jacques Lenfant ;
Clinique ARAGO
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